Du 12 au 18 juillet 2021, la 26e édition du Festival Les Suds, à Arles recevait 34.000 festivaliers autour de 76 concerts & rencontres musicales.
Lire l'édito de la 26e édition :
LA VOIE DES MUSIQUES DU MONDE
Les Musiques du Monde sont transmission. Pour construire une identité collective, pour préserver les récits communs de l’oubli, pour continuer une mémoire à travers les exils et les séparations, des chants se partagent de génération en génération. Les artistes de cette 28e édition en sont l’expression, à l’instar de Wasifuddin Dagar, vingtième descendant d’une lignée de chanteurs dhrupad, d’Houria Aïchi, qui explore et magnifie les répertoires de son Aurès natal, ou encore de la Famille Chemirani, réunie pour un hommage autour du patriarche Djamchid.
Les Musiques du Monde sont hybridation. Dans la Cour de l’Archevêché, le cante jondo de Perrate résonnera d’une Afrique lointaine. Au Théâtre Antique, la cumbia de Combo Chimbita vibrera de l’énergie rock de New York, tandis que dans la nuit du jardin Hortus, le maloya de Maya Kamaty se fera rap et que, place Voltaire, la Fanfara Station italo-tunisienne se mêlera d’électro. Ces métissages accentuent les singularités sans rien ôter à leur authenticité, ils modifient la perception de l’Autre en redessinant des territoires utopiques, des identités prochaines.
Les Musiques du Monde sont création. Grâce à l’audace d’artistes aventureux.ses, les frontières entre les esthétiques, entre les continents, s’effacent au profit d’un langage universel. Cette année, le Mali sera au cœur de deux des créations que nous accueillerons, comme un manifeste pour un pays dont les divisions ne doivent pas faire oublier la grandeur. La première réunira Raül Refree, musicien iconoclaste barcelonais, et Rokia Koné, grande voix engagée de Bamako, la seconde rassemblera Ballaké Sissoko, Vincent Ségal, Émile Parisien et Vincent Peirani pour un dialogue complice et virtuose.
Les Musiques du Monde sont appropriation. Les artistes ont toujours su puiser leur inspiration sur les terres qui les accueillaient ou qui nourrissaient leur imaginaire. Dans un subtil jeu d’aller et retour, d’ida y vuelta, Tinariwen teinte ainsi son dernier opus d’accents country qui rappellent la parenté de ces musiques, le jazz d’Avishaï Cohen évoquera les esprits yoruba avec la Banda cubaine ‘Iroko’, et le répertoire de La Mòssa embrassera les pays d’Oc et de Méditerranée. Ces inspirations, loin d’être des appropriations illégitimes sont une fertilisation nécessaire des imaginaires.
Mais les musiques du monde, c’est avant tout une façon d’écouter et de dire le monde. Face aux défis d’une crise systémique et du changement climatique, la transmission, le métissage et la création sont des forces d’adaptation dont il faut se saisir pour apprendre à mieux vivre ensemble. Les artistes nous montrent la voie, avec générosité et passion, suivons-les sur la piste de cette 28e édition !
Stéphane Krasniewski
Directeur des SUDS, à ARLES